«Chaque artiste crée ses précurseurs. Son travail modifie notre conception du passé autant que celle du futur». Jorge Luis Borges

vendredi 11 décembre 2015

Biber Sonates du Rosaire, Ariadne Daskalakis violon; Esemble Vintage Köln

Sonates du Rosaire
Heinrich Ignaz Franz von Biber (1644-1704)
15 sonates pour violon et basse continue
Ariadne Daskalakis, violon baroque
Esemble Vintage Köln
Bis-2096: enregistrement septembre 2013.

«J'ai consacré tout ce que j'ai écrit ici à l'honneur des 15 mystères sacrés, puisque vous les promouvez si ardemment.» H.I. Biber.
Le recueil est divisé en trois parties, comprenant:les mystères joyeux, douloureux et glorieux. 
Biber, qui avait la réputation d'être un des plus grands violonistes de l'Europe, donna un accord différent à chacune des 15 sonates. Cette diversité a évidement une influence dans les couleurs et les combinaisons des tonalités. La forme des pièces est emprunté de la traditionnelle suite baroque, mais le choix des mouvements et des danses est relié au "programme". Voilà la nouveauté, et son originalité, pas vraiment sa musique, mais son sens.
Le sons de Daskalakis est très profond et chaleureux. Avec une technique époustouflante, elle arrive à dévoiler une face plus "humaine" de cette merveilleuse musique. On dirait que sa vision et celle de Biber font une même et unique interprétation d'une foie, très présente jadis, mais qui est en quête de ré-invention dans nos temps modernes.
Un disque à garder.

Philippe Adelfang, décembre 2015

Écoutez un extrait ici:

dimanche 6 décembre 2015

Jean Sébastien Bach, cantates d'anniversaires. Bach Collegium du Japon.




Jean Sébastien Bach 
Cantates d'anniversaire
Bach Collegium, chœur et orchestre 
Masaaki Suzuki, direction
Bis-2161, enregistrement septembre et octobre 2014.
Le Bach Collegium du Japon, toujours sous la direction de Masaaki Suzuki, nous livrent, encore une fois, un bijou de l'interprétation musicale de Bach.
Cette fois-ci dans cet enregistrement on retrouve deux cantates "dramatiques" de 1733 que Bach composa à l'occasion de l'anniversaire du Prince Électeur de Saxe et de son épouse, et qui formaient partie de ses «propositions musicales» pour accéder au poste convoité de compositeur de la Chapelle Royale. Finalement ceci lui fut accordé un peu plus tard en 1736, on pouvait dire que le Kapellmeister était au sommet de son art.
Ce que j'aime des versions de Suzuki, c'est tout d'abord, l'élection et la qualité des voix et des instrumentistes. C'est pour cette raison que son intégrale des cantates sacrées reste avec, peut-être celle de Gardiner, comme les meilleures réalisées dernièrement.
Et ce disque confirme tout à fait cette opinion, tant pour sa qualité artistique, comme pour sa réalisation et conception musicale de haut niveau.

Philippe Adelfang, décembre 2015.

samedi 14 novembre 2015

SEASONS, OLIVER DAVIS ET ANTONIO VIVALDI



Seasons
Oliver Davis
Antonio Vivaldi
Kerenza Peacock,violon
Grace Davidson, soprano
Trafalgar Sinfonia
Ivor Setterfield, direction
Enregistrement: mars 2015
Signum Records SIGCD437

Ce disque vous permettra de découvrir, non seulement l'exceptionnel ensemble Trafalgar, mais aussi les œuvres originales et rafraîchissantes du compositeur Oliver Davis.
Pour le projet de ce disque Davis a puisé sur les textes qui sont l'origine littéraire des quatre saisons de Vivaldi.
Avec la géniale complicité de la soprano Grace Davidson, le résultat est époustouflant et magnifique.Une très belle complicité, pour une mariage du passé et du présent, en ayant comme particularités communes, la grâce et l'harmonie.

Philippe Adelfang, novembre 2015.

dimanche 8 novembre 2015

Ondas Cantigas de Amigo, Martín Codax

Ondas
Martín Codax
Cantigas de amigo
Vivabiancaluna Biffi, voix et viole
Pierre Hamon flûtes médiévales.
Enregistrement: septembre 2014
Arcana: A390

On ne connait presque rien de Martín Codax. Seulement, peut-être, qu'il appartenait à cette "toile" formidable que fut le mouvement des troubadours au XIII siècle.
Ce n'est que tout à fait par hasard, quand le manuscrit incluant les Cantigas de Amigo, fut trouvé par un bibliothécaire, Pedro Vindel, en 1915, que le nom de Martin Codax fut finalement connu. Ce "Pergaminho Vindel" est aussi contemporain d'un autre célèbre recueil nommé: Cantigas de Santa María, commandé par le roi Alphonse X de Castille. Mais il faut souligner une différence essentielle, les Cantigas de Amigo de Codax sont de nature profane et non religieuse comme celles de l'illustre roi castillan. En effet ce sont des portraits sur l'amour, la femme, la mer et les vagues, bref les visions artistiques que le musicien avait du port de Vigo, surement sa ville natale.
Ce disque est formidable et tout à fait recommandable. Il représente une porte vers un passé lointain et glorieux, où le mouvement des troubadours assurait les échanges culturelles dans toute l'Europe.

Philippe Adelfang, novembre 2015 

dimanche 13 septembre 2015

Mozart on the beach. Paul Badura-Skoda interprète Mozart



Mozart on the Beach
Concertos pour piano KV271 et KV467
Adagio en ut majeur KV356
Paul Badura-Skoda, piano
Orchestre Symphonique de Cannes
Wolfgang Doerner, direction.
Enregistrement février 2015.

Paul Badura-Skoda le dernier des classiques?
Quand j'écoute ses enregistrements, j'ai l'impression que le temps me parle à travers une conscience artistique, hélas, révolue maintenant. Pourquoi?  Simplement parce que Badura-Skoda appartient à une classe d'artiste appart et unique. Peut-être un des derniers d'une tradition où le son, la clarté du jeu et la forme d'interpréter une partition, sont rares ces temps-ci. Je veux dire, un artiste qui renonce à tout artifice superficiel et superflu. Un artiste pour qui l'oeuvre est essentielle et c'est tout ce qu'on a besoin de savoir de lui. La musique devrait toujours être un art porteur d'un message d'élévation, et dans cette ligne de pensée, Badura-Skoda est un des derniers apôtres.
Grace au lien contractuel entre le génial pianiste et la maison de disque Gramola, on a le droit de temps à autre à des véritables miracles musicaux.
Merci pour la musique, c'est notre âme qui vous remercie.

Philippe Adelfang, septembre 2015.

vendredi 11 septembre 2015

Johannes Moser Dvorak & Lalo Cello Concertos



Antonin Dvorak (1841-1904).
Concerto pour violoncelle op 104.
Édouard Lalo (1823-1892).
Concerto pour violoncelle en ré mineur.
Johannes Moser, violoncelle.
PKF- Prague Philharmonia, Jakub Hrusa, direction.
Enregistrement: janvier 2015.


Pour son premier enregistrement chez Pentatone, le violoncelliste Johannes Moser a choisi un chef d'oeuvre absolu comme le concerto de Dvorak, à côté d'une oeuvre moins connue comme le concerto de Lalo en ré mineur.
Le résultat est simplement magique. Moser nous livre des versions raffinées est très senties de ces deux magnifiques concertos. Le Dvorak joué d'une façon mystérieuse, avec une passion, je dirais, intelligente. Il fait ressortir toute la richesse et les détails de cette partition, tout en gardant son aspect rythmique très soigné et toujours au premier plan.
La version du concerto de Lalo est époustouflante, partition plus complexe, Moser nous amène à découvrir les qualités cachées que ce concerto, injustement oublié, comporte.
Une nouveauté à ne pas rater.
Philippe Adelfang, septembre 2015

lundi 7 septembre 2015

Benedetto Marcello Psalms-Estro-Poetico Armonico Voces8 Les Inventions


Benedetto Marcello (1686-1739)
Psalms-Estro-Poetico Armonico
Adapté en anglais par Charles Avison (1757)
Voces8
Les Inventions, Barnaby Smith & Patrick Ayrton direction.
Enregistrement 2015
Signum Classics: SIGCD391

Disque absolument recommandable, avec des interprétations magnifiques de la part de l'ensemble vocal Voces8, brillamment épaulés par les instrumentistes de Les Inventions. Ce disque nous fait découvrir des adaptations que le musicien anglais Charles Avison réalisa en 1757 de certaines pièces de l'Estro-Poetico Armonico du compositeur vénitien Benedetto Marcello. La popularité de Marcello avait percé les frontières et s’étala non seulement en Allemagne où Telemann et Mattheson en rendirent compte, mais aussi en Angleterre où Avison réalisa une série d'adaptations en anglais de ses œuvres religieuses, dont plusieurs d'entre elles sont enregistrées pour la première fois en CD.
Le résultat est incroyable et bouleversant. L'art de l'adaptation et de la traduction à son meilleur.
Un disque à se procurer le plus vite possible.

Philippe Adelfang, septembre 2015.

lundi 10 août 2015

J.S.Bach Variations Goldberg Lars Vogt, piano

J.S.Bach Variations Goldberg
Lars Vogt, piano
Enregistrement, mars 2014
Ondine ODE 1273-2
Avec un regard humble, un sentiment dépuré et un discours dépourvu de tout maniérisme superflu, Lars Vogt nous dévoile en disque sa vision des variations Goldberg de Bach.
Même si, comme il nous le dit, un de ses points de départ soit la version de Gould, à l'écoute de ce disque on se rend compte qu'on est en présence d'un autre type de musicien. Pour Vogt le sentiment n'est pas un véhicule du discours musical, mais plutôt une frontière à ne pas dépasser. Cette "approche" intelligente, fait en sorte que sont jeux soit toujours clair et transparent, sans aucun élément externe à la musique qui puisse le déranger.
Version moderne et attendue, elle aura surement une place de choix dans la discographie, en tout cas dans la mienne.
Philippe Adelfang,août 2015

lundi 20 juillet 2015

Œuvres pour violoncelle et orchestre de Glazunov, Prokofiev et Tchaikovsky


Glazunov, Concerto Ballata op.108, Chant du ménestrel op.71 et Mélodie op.20
Prokofiev, Concertino op.132, Nocturne op.19
Tchaikovsky, Variations sur un thème Roccoco op.33
Jamie Walton, violoncelle
Royal Philharmonic Orchestre
Okko Kamu, direction
Enregistrement, mars 2013
Signum Classics SIGCD407


Dans la pléiade des notables violoncellistes d'aujourd'hui, il faudrait sans doute retenir le nom de Jamie Walton. Avec un son clair et pur, un jeux précis et harmonieux, sans artifice, il nous fait penser, que le vrai artiste devrait être toujours au service de la musique. Sans aucun maniérisme, il nous promène dans un monde intime et réfléchi, où tout est sagement quantifié. Que ce soit dans des œuvres moins connues de Glazunov, le concerto inachevé de Prokofiev, ou les déjà célèbres variations sur un thème rococco de Tchaikovsky, Jamie Walton réussi toujours à rendre un juste hommage aux partitions. Très bien épaulé par la RPO sous une direction éclairé d'Okko Kamu, font de ce disque une agréable réussite.

Philippe Adelfang, juillet 2015

dimanche 19 juillet 2015

Chrétienté, écoute!


Chansons pieuses allemandes de l'automne du moyen-age.
Sabine Lutzenberger, voix
Raitis Grigalis, voix
Baptiste Romain, vielle, rote et cornemuses
Ensemble Leones
Marc Lewon, direction
Couverture: détail d'une oeuvre de Rogier van Weyden (1445/50) Hotel-Dieu de Beaune (France).
Enregistrement, octobre 2013
Christophorus CHR77395 juillet 2015

Ce disque merveilleux nous amène dans l'univers des derniers «minnesinger». On peut écouter non seulement des œuvres du célèbre Oswald von Wolkenstein (1376-1445), mais aussi celles du moins connu "Moine de Salzbourg", dont on ignore son vrai nom, et à peu-près tout de sa vie.
L'enregistrement est sagement enchevêtré de pièces jouées dans des versions purement instrumentales, tirées d'hymnes religieux. 
Petit miracle de l'enregistrement, que je recommande à tous ce qui pensent que notre monde d'aujourd'hui, s'éloigne inexorablement du spirituel.
Les artistes sont simplement excellents. Grace à leur versions, austères mais senties, ils arrivent à nous transporter dans un monde lointain, où la parole et la musique communiaient avec une naturalité divine.
Une très agréable surprise pour nous mêmes et notre foi, si elle existe encore.

Philippe Adelfang, juillet 2015

vendredi 26 juin 2015

Ouvertures symphoniques de Johann Friedrich Fasch


Johann Friedrich Fasch (1688-1758)
Overture Symphonies
Les Amis de Philippe
Ludger Rémy, clavécin et direction.
Enregistrement, avril 2013.
CPO: 777952-2

Voici ma recommandation de cette semaine, une nouveauté du label CPO avec des ouvertures du compositeur allemand Johann Friedrich Fasch, interprétées magistralement par Les Amis de Philippe. Ce disque est intéressant non seulement pour ses qualités artistiques et musicales, si non aussi comme un témoignage sonore de l'évolution que l'ouverture a eu dans les mains de ce génial compositeur. Bien que les dimensions de l'orchestre soient encore baroques, c'est dans le discours harmonique et dans leur facture formelle qu'on va trouver un certain renouvellement, qui nous fait déjà songer à la période classique à venir.
L’interprétation époustouflante, plein de vie, tout à fait rythmique des Amis de Philippe, guidés par Ludger Rémy font de cet enregistrement, une référence.
Merci aux artistes et à CPO pour cette découverte, simplement ajouter que des cinq ouvertures, trois sont enregistrées pour la première fois dans un disque.
Bravo!

Philippe Adelfang, juin 2015.




samedi 20 juin 2015

Les motets des ancêtres de Johann Sebastian Bach, une musique qui nous vient de l’âme, une interprétation divine.


Motets des ancêtres de Johann Sebastian Bach.
Vox Luminis
Scorpio Collectief
Lionel Meunier,direction.
Coffret 2 CD Ricercar, enregistrements 2013 et 2014
RIC347

Si vous avez la curiosité d'explorer la musique des ancêtres familiaux de Jean Sébastien Bach, ce coffret de deux disques est indispensable. Il vous permettra de découvrir des œuvres de trois compositeurs de la famille Bach dont Johann Bach (1604-1673), Johann Christoph Bach (1642-1703) et Johann Michael Bach (1648-1694). Il réunit tous les motets polyphoniques conservés de ces trois compositeurs, et nous donne un aperçu, non seulement du type de musique qu'on composait à l'époque "luthérienne" en Allemagne, mais aussi aux influences que cette musique subit tout au long du XVII siècle. À noter, l'usage de l'orgue comme un instrument de basse continue, et l'inclusion des chorals luthériens dans l'écriture de ces motets,leurs donnent une cohésion stylistique unique.
Du point de vue des interprétations, ce coffret est une merveille absolue. Le niveau technique et interprétatif de Vox Luminis est incroyable. Je dirais que c'est l'idéal de musicalité au service de la parole, que tout musicien qui évolue dans ce type de répertoire, devrait toujours avoir. Très bien épaulés par les trombones et le cornet de l'ensemble Scorpio Collectief, font que cet enregistrement soit dorénavant une référence dans ce genre de musique. Sans doute un des plus beaux cadeaux a offrir, une musique qui vient de l'âme pour une interprétation qui inclut le divin. Une nouveauté à ne pas rater.

Philippe Adelfang, juin 2015.

vendredi 24 avril 2015

Elinor Frey, Lorenzo Ghielmi Berlin Sonatas

Berlin Sonatas
Elinor Frey, violoncelle à cinq cordes;
Lorenzo Ghielmi, Silberman pianoforte;
Marc Vanscheeuwijck violon basse.
Enregistrement, septembre 2014
Passacaille: PAS1006.

Dans ce disque Elinor Frey nous fait découvrir un instrument plutôt rare dans l'histoire de la musique. Il s'agit du violoncelle à cinq cordes, dont Bach a donné quelques lettres de noblesse, notamment dans sa suite en ré majeur pour violoncelle seul BWV1012. Mais selon les recherches d'Elinor Frey, un grand nombre de partitions créées au milieu du XVIII siècle, s'adapteraient "naturellement" à cet instrument, représentant très bien une certaine esthétique dite Berlinoise.
Le choix des pièces et des compositeurs est tout à fait en concordance avec cette idée. On y trouve à coté de  très connus compositeurs comme Johan Christoph Friedrich Bach, Carl Philipp Emanuel Bach et Franz Benda, d'autres qui le sont moins comme Carl Friedrich Abel, Johann Philipp Kirnberger ou Carl Heinrich Graun.

Belles interprétations, d'Elinor Frey, pleines de fantaisie, avec une complicité musicale en Lorenzo Ghielmi qui est de premier ordre.
Enregistrement très recommandable qui vous permettra de découvrir un répertoire hélas encore pas très connu , mais dont le disque, j'en suis certain, joue un rôle très important pour sa sauvegarde.

Philippe Adelfang, avril 2015.

dimanche 22 mars 2015

Pourquoi devrait-on faire un disque?


Cette question serait la première  que tout artiste devrait se poser avant de s'embarquer dans une aventure discographique.
Et la toute première réponse serait. parce que je veux dire quelque chose de différent, et  qui ne s'est jamais dit.
C'est le cas dans cet enregistrement du pianiste David Fray. Il nous apporte une vision nouvelle d’œuvres déjà très connues et également très jouées dans le répertoire pianistique.
Malheureusement cette idée n'est pas la norme, et les raisons pour faire toutes sortes d'enregistrements sont variées et nuisent parfois au succès de l'entreprise.
L'idée dans ce disque, est de réunir des œuvres à deux et à quatre mains de Schubert, qui ont un caractère de fantaisie dans leur forme. Ceci n'est pas absolument nouveau dans l'histoire de la musique, mais Schubert donnera quelques lettres de noblesse, a certaines compositions, qui auraient pu être plus banales, mais qui, sous sa plume, atteignent le rang de chefs-d’œuvre.
L'interprétation de Fray, est tout à fait en concordance, avec ce qui a été écrit et dit. Son son est différent, disons nouveau. Il prend son temps, pour jouer, pour parler, bref pour dire quelque chose. Et pour l'auteur de cette chronique, c'est du nouveau dans le monde discographique actuel.
Il trouve en Jacques Rouvier le partenaire et complice idéal, en nous donnant une version rafraichissante de la très célèbre fantaisie en fa mineur. Et j'attire votre attention, sur la pièce Lebensstrürme qui clos ce disque, où toute la magie du génial compositeur permet de nous offrir une musique plus instable du point du vue harmonique, mais qui est une réussite mélodique et thématique hors pair.
Il ne nous reste qu'attendre son prochain disque, avec impatience, en souhaitant qu'il vienne jouer à Montréal le plus vite possible. 

David Fray, piano
Jacques Rouvrier, piano
Enregistrement, novembre 2014

Philippe Adelfang, mars 2015.

dimanche 15 mars 2015

Bach et ses contemporains, parlons de Bach un peu.


Johann Sebastian Bach (1685-1750)
Violin Concertos
Fredik From, Peter Spissky, Bjarte Eike et Manfredo Kraemer violons solistes
Antoine Torunczyk, hautbois
Concerto Copenhagen
Lars Ulrik Mortensen, direction.
Enregistrement, 2011
CPO : 777904-2



Le disque de cette chronique regroupe les concertos que Bach écrivit pour violon et orchestre.
Qu'est ce qui fait que la musique de Bach soit universelle? Évidement sa qualité et sa profondeur. Mais il y aussi autre chose. La musique de Bach est devenu un repère, un patron pour les musiciens. Mettons qu'un élève se présente pour une audition n’importe où, il est sûr et certain qu'on va lui demander de jouer du Bach à un moment donné. Pourquoi? Simplement parce que c'est la façon la plus évidente de voir où ce musicien en est, dans son parcours artistique. Bach est devenu un test, qui permet de constater le degré de développement artistique. Quand j’étais au conservatoire, je suis allé écouter un concert du grand violoncelliste Rostropovich, dans un théâtre Colon qui était bondé. Moi évidement comme tout étudiant, j'étais début au dernier étage. Au concert il avait joué les variations Rococo de Tchaikovsky, mais après des minutes interminables d’applaudissements, il se décida à nous jouer son seul bis de la soirée, une passacaille de Bach. Il résuma, cette soirée là, dans cette unique et courte pièce, tout son art et son savoir faire musical. Et cela est possible parce que Bach est l'essence même de la musique. C'est pour cette raison que ces chroniques s'appellent « Bach et ses contemporains ». Sa musique est sans aucun doute l’âme de notre musique occidentale. Ce n'est pas le début, mais c'est la raison d'être que tout art doit, et devrait avoir, toujours et tout le temps.
Les versions du Concerto Copenhagen, sont d'une poésie merveilleuse. Leur musicalité et leur façon d'interpréter cette musique est absolument géniale. On sent que leurs jeux ont un soin et une minutie qui méritent notre éloge.

Philippe Adelfang, mars 2015.

vendredi 27 février 2015

BACH ET SES CONTEMPORAINS : LE CAS DE CARL HEINRICH GRAUN

Le 26 mars de 1755, cinq ans seulement après la mort de Bach, la première exécution de l'Oratorio-Passion de Carl Heinrich Graun (1703/04-1759) La mort de Jésus eut lieu à Berlin : son succès fut immédiat et assuré. L'Oratorio fut joué 70 fois encore dans une période de 130 ans, musique à être jouée pendant la semaine sainte. Elle fut interrompue uniquement quand Mendelssohn imposa La Passion de St-Mathieu de Bach dans les années 1858-1866.    
L’œuvre avait été commissionnée par la noblesse prussienne, et elle fut jouée quelques jours avant sa première officielle par des musiciens et amis de Graun, dont Carl Philipp Emanuel Bach, qui tenait le clavecin. Évidemment, tous ont apprécié le style nouveau, plus dépouillé et centré dans l'expansion mélodique plutôt que dans la densité du contrepoint. Il y avait déjà quelques années que le style de Bach et sa façon de composer n'était plus à la mode. Il fallait regarder vers l'avant et se diriger vers une nouvelle vedette dans le monde musical : la mélodie accompagnée.
Graun a appris tout ça en composant ses opéras, dont le plus fameux fut Montezuma pour l'Opéra de Berlin, qui fut un grand succès à l'époque.
Si on compare cette œuvre avec les Passions de Bach, l'effectif est plus réduit : soprano, ténor et baryton soliste, chœur mixte et ensemble instrumental.  Évidement l'effet d'une grande masse sonore a été remplacé par un effectif plus réduit, plus approprié à cette expansion mélodique.
L'interprétation est très bonne, l'orchestre est de premier ordre et les solistes sont d'un grand niveau. Le défi pour l'éditeur, c'est de faire connaître cet enregistrement en dehors de l'Allemagne.
Voici un autre compositeur, pas très connu du grand public, que je vous invite à découvrir et qui a été un acteur important au moment où un passage entre l'époque baroque et classique s’opérait.

Carl Heinrich Graun
Der Tod Jesu
Monka Mauch, soprano
Georg Poplutz, ténor
Andreas Burkhart, baryton
Arcis-Vocalisten München
Barockorchester L'arpa festante
Thomas Gropper, direction
Enregistrement mai 2014
Oehms Classics : OC1809

Philippe Adelfang.

mardi 17 février 2015

LA PREMIÈRE SYMPHONIE DE RACHMANINOV, OU L'EFFET DÉVASTATEUR DE LA CRITIQUE MUSICALE

Si jamais on me demandait de citer un exemple de conséquence néfaste d'une mauvaise critique musicale sur la carrière et la vie d'un compositeur, je citerais volontiers le cas de la première symphonie de Sergei Rachmaninov.
Ce fut à St-Petesbourg, le 15 mars 1897, que le célèbre musicien et journaliste César Cui écrivit: « Si jamais il y avait un conservatoire en enfer où un étudiant talentueux composerait une symphonie à programme sur les sept plaies d'Égypte, elle sonnerait sans doute comme celle de M. Rachmaninov.»
Ce fut trop pour le jeune artiste. Évidement, après cette création tourmentée, accueillie par des critiques unanimes et décourageantes, Rachmaninov tomba dans une longue et profonde dépression créative. Il n'arrivera à s'en sortir qu'avec l'aide d'un célèbre psychiatre, qui sera d’ailleurs le tributaire de son célèbre deuxième concerto pour piano, peut-être une des œuvres majeures du répertoire.
Mais qu'est-ce qu'il en reste, de ces critiques? Rien du tout. Une anecdote seulement. Avec le recul du temps, on comprend que Cui avait tort et raison en même temps. Peut-être ses critiques étaient autant une démonstration de force entre deux centres musicaux rivaux, Moscou et St-Petesbourg, que des véritables comptes-rendus des concerts, honnêtes et dépourvus de toute allégeance politique.
Si on compare la Première Symphonie de Rachmaninov avec celles de Glazounov (le musicien qui dirigea l'orchestre pendant sa création), on se rend compte que celle de Rachmaninov avait des qualités musicales suffisantes, qui méritaient d'être soulignées.
Tout cela pour dire que toute critique devrait être écrite de la façon la plus objective possible. Il faut toujours tenir compte du contexte, ne jamais oublier que la musique est un langage et que, comme tel, il est souvent assujetti à des influences externes.
Je suis un inconditionnel admirateur du chef russe Kitajenko. Sa version de cette Première Symphonie ne fait qu'ajouter un autre jalon à son énorme carrière musicale.

Sergeï Rachmaninov
Symphonie n°1 op.13
The Rock op.7
Gürzenich-Orchester Köln
Dimitrij Kitajenko, direction
Enregistrement janvier et mai 2013.
Oehms Classics : OC 440

Philippe Adlefang

mercredi 14 janvier 2015

CAMARADE PROKOFIEV À CHICAGO

Il y a un lien subtil entre la ville de Chicago et Prokofiev. Le compositeur russe y est allé plusieurs fois, à la demande d'un riche américain, diriger et jouer ses œuvres. En 1937, année de son dernier voyage en Amérique, Prokofiev dirigea une des suites de son nouveau ballet Roméo et Juliette, et cela veut dire que Chicago a été la première ville américaine à entendre cette extraordinaire musique. La guerre et le régime stalinien qui suivront empêcheront tout voyage du compositeur en dehors de l'URSS.
Les numéros et les scènes du présent disque sont choisis par Muti parmi les deux suites orchestrales que Prokofiev avait composées, justement pour la diffusion de son œuvre. Muti les a ordonnés pour qu'on puisse suivre un ordre chronologique d'après la célèbre tragédie de Shakespeare.
La version de Muti est très envoûtante; on pourrait la qualifier de théâtrale, avec des tutti époustouflants. On apprécie la qualité des solistes de l'orchestre, ainsi qu'une capacité dynamique hors du commun. La prise de son est enivrante et tout à fait remarquable. Le seul petit bémol, c'est la durée de presque 49 minutes; on aurait envie d'un peu plus. Mais pour ce qui a été offert,  rien à dire, tout au contraire : bravo encore une fois à Muti et l'excellente CSO. Du pur plaisir.

Suite from Romeo And Juliet
Chicago Symphony Orchestra
Riccardo Muti, direction
Enregistrement, octobre 2013
CSOR 901 1402
Philippe Adelfang

vendredi 9 janvier 2015

JEAN-EFFLAM BAVOUZET, LE NARRATEUR D'ÉMOTIONS EST EN VILLE!

Au moins on a la musique de Jean-Efflam Bavouzet... quelqu'un l’a dit ou écrit quelque part.
Avec la quantité de productions discographiques disponibles dans le marché présentement, pourquoi certaines versions s'imposent-elles? Eh bien simplement parce que vous ne pouvez pas vous passer d'elles. Elles sont devenues des références. C'est le cas pour l’enregistrement de ces trois concertos deHaydn que Bavouzet a réalisé avec la Manchester Camerata.
Espiègle, avec une profondeur légère et un toucher tout à fait chaleureux et limpide, il nous offre des versions remarquables. Sans jamais tomber dans aucun excès, Bavouzet réussi à se transformer en une espèce de narrateur d’émotions. La partition est celle-ci et voilà ce que je pense d'elle, aurait-il sûrement dit, mais toujours en gardant le sens des proportions que cette musique demande.
Si jamais vous voulez expérimenter l'effet Bavouzet en concert, il sera à la salle Bourgie de Montréal les 14 et 15 janvier prochains, pour deux prestations à ne pas rater.

Haydn Piano Concertos
fa majeur Hob.XVIII: 3
sol majeur Hob.XVIII:4
ré majeur Hob.XVIII : 11
Jean-Efflam Bavouzet, piano
Manchester Camerata 
Gabor Takacs-Nagy, direction
Enregistrement, octobre 2013
Chandos: CHAN 10808

Philippe Adelfang